Interclubs



La journée a commencé par un coup d’éclat et un coup de gueule. Le premier émanait d’un Benjamin Compaoré (S2A) peut-être dans la forme de sa vie en cette année olympique. Grisant et dangereux à la fois. L’athlète n’est jamais plus fragile que lorsqu’il est affûté.

Le Strasbourgeois de Wolfisheim avait opté pour la longueur afin de ménager son talon droit. Et vlan, dès le 1er essai, il devient le premier Alsacien à plus de 8m (8,02m), vu que le record régional lui appartenait (7,88m).
« Cela laisse augurer de très, très belles choses au triple »

Sagement, il décidait d’en rester là. «Sur mon dernier saut d’échauffement, j’ai ressenti une petite gêne à l’adducteur droit. Pas question de prendre de risque. Vu que je suis déjà qualifié pour les JO au triple, ce sera le mot d’ordre.»

Il émettait néanmoins des regrets. «Je me sentais capable de sauter à 8,20/8,30m.» Sachant que les minima pour les championnats d’Europe sont de 8,05m, pour les JO de 8,15m. Aurait-il des velléités de doubler ? «Et pourquoi pas aux Europe ?, lançait-il sérieusement. J’ai bien envie de refaire un concours de longueur d’ici là. ‘‘Steve” (son coach Jean-Hervé Stievenart, NDLR) sera archicontre, mais bon, mon changement de pied d’appui au triple, il était contre aussi…»

Toujours est-il que ces 8,02m, avec élan raccourci de deux foulées… par manque de place (!), «laisse augurer de très, très belles choses au triple».
Nicollin sur sa lancée

Venons-en au coup de gueule, légitime, de Jacques Danail, quant à l’aire d’élan du javelot, là aussi trop courte… de 5m! «Comment peut-on organiser des interclubs dans un stade qui n’est pas aux normes?» Pire, ladite aire présentant… des trous, athlètes et jury ont déménagé côté opposé du stade. Plus de trou, mais pas un mètre d’élan de plus.

Cela n’a pas empêché Jérémy Nicollin (ANA) de poursuivre son festival entamé une semaine plus tôt (75,92m) à Obernai. 74,25 puis 74,30m: que cela aurait-il donné dans des conditions normales?

Beau joueur, le Savernois préférait en rire. «Qui sait si je n’aurais pas moins bien lancé avec élan complet? Mais c’est vrai que j’ai été obligé de forcer ma course d’élan, d’où quelques petites fautes, y compris lors de mes meilleurs essais. N’empêche, les bases sont excellentes et me font espérer des jets à 80m, qualificatifs pour les championnats d’Europe.»

Le champion de France en titre, Jérôme Haeffler, lui, se contentait volontiers de ses 64m. «Je voulais 65m, mais ça va, ça revient doucement. Aujourd’hui, je n’en étais qu’à ma 4e séance technique.»

En fin de course, le Guebwillerois hésite toujours à poser résolument au sol son pied gauche, sujet à sa double rupture du tendon d’Achille. «En janvier, j’étais parti en stage en Afrique du Sud pour ça et je me suis blessé bêtement au mollet droit. Cela a tout retardé. Mais bon, les objectifs à atteindre sont pour juin.»
Exigeant El Bouajaji

À côté, Mohamed-Amine El Bouajaji (S2A) venait de boucler son 800m en améliorant son record personnel de plus d’une seconde : 1’49’68”, seul face au vent. Il avait beau épater la galerie, il faisait la moue. « J’espérais courir en 1’48”, mais j’ai pioché sur la fin. »

Il reconnaissait néanmoins : « Seul, je voulais voir ce dont j’étais capable. Mon record d’emblée, c’est bien. Mais les vrais perfs sont à venir. » Sur 1500m. « Et il va y avoir des surprises », promet-il…
Distel-Bonnet : faux départ

Au cœur de l’après-midi, Céline Distel-Bonnet ne pouvait hélas céder au même optimisme, clairement atteinte par ses 11”62 seulement – 2eperformance du jour en valeur absolue tout de même – sur 100m, loin de ce que promettaient ses longs mois d’entraînement après avoir volontairement zappé la saison en salle.

Elle pensait que les huit mois sans compétition n’auraient pas de prise sur elle. «Et bien si. J’étais stressée, contractée. J’ai fait tout ce qu’il ne fallait pas faire : debout après trois appuis, le bassin trop en arrière, sans jamais arriver à placer les choses.»

Son caractère de championne l’efforçait à reprendre le dessus et à positiver. «C’était brouillon, faut mettre au propre. Une première course n’est jamais facile. J’avais l’habitude de reprendre mes marques sur 200m. Sur 100m, c’est la première fois. C’est le début de saison, c’est comme ça. Il ne faut pas se laisser déstabiliser.»

Les interclubs, pardon, le championnat de France des clubs, ne se décide toutefois pas à l’aune des performances (lire ci-dessous à gauche) individuelles. Tout est dans le collectif, l’homogénéité. En la matière, les événements ne répondent jamais totalement aux attentes.
Les bulles explosent

Au S2A, quatre forfaits pour blessure en fin de semaine ont fait passer les voyants du vert à l’orange. La blessure d’Ilias Tano à l’échauffement du 200m a engendré la bulle que tous veulent éviter à leur club. Cheik Touré a achevé son 100m sur une jambe, devant renoncer au relais.

La bulle, l’ANA y a eu droit au poids masculin, le PCA à la hauteur féminine et à la marche... pour l’instant, les résultats officiels ne tenant pas compte de la sélection de David Kuster en équipe de France ce même week-end.

Finalement, en N1A, l’ANA limite les dégâts avec ses 54555 points, même s’il faudra batailler pour le maintien. «Vu les forces en présence, résume le manager général Claude Bouton, on ne pourra être que plus fort dans deux semaines.»

Le constat est identique en N1B. «On ne s’en sort pas trop mal», soupire Doris Spira, la présidente du S2A, ce qu’aurait pu lui répondre en écho son alter ego du PCA, Jean-Pierre Hoerner.

Avec 53469 et 53138 points respectivement, le PCA et le S2A se classent 4e et 5e parmi les équipes qu’ils rencontreront au 2e tour, sachant que cinq clubs se tiennent dans un mouchoir de poche, à plus de 2000 points tout de même de Sarreguemines-Sarrebourg.

À ce stade, la montée relève du doux rêve. Mais il n’est jamais interdit de rêver.